La remise en cause des investissements nucléaires à la suite de ce que l’on peut désormais qualifier de catastrophe nucléaire survenue en mars 2011 dans les réacteurs de la centrale de Fukushima au Japon, et l’urgence des réponses au réchauffement climatique planétaire amènent les gouvernements mondiaux à devoir faire très rapidement un choix énergétique stratégique.
Les investissements nécessaires dans les capacités de production électrique renouvelable en substitution aux centrales nucléaires et aux centrales à charbon pour couvrir les besoins électriques locaux, régionaux, nationaux et européens (et sur les autres continents) n’ont de sens économique, énergétique et écologique que s’ils accompagnent des investissements simultanés dans l’efficacité et l’économie d’énergie agissant sur la demande électrique générale, et dans des systèmes permettant un stockage électrique de masse (production d’hydrogène par électrolyse, recharge de batteries de véhicules électriques, batteries de stockage massif, supercondensateurs) et une production électrique d’appoint renouvelable souple immédiatement mobilisable (centrales et microcentrales de cogénération à biomasse, à biogaz, à hydrogène, stations de piles à combustibles de cogénération).
Parmi tous les systèmes de production électrique existants, l’électricité éolienne présente des atouts considérables :
-
le temps de retour énergétique (TRE, définition § A.2) le plus court
-
l’émission de gaz à effet de serre la plus basse
-
le coût d’investissement par kilowatt le plus bas
-
une mise en place rapide quand les procédures administratives sont normales
-
un prix de revient du kilowatt-heure compétitif.
Son développement mondial rapide depuis une décennie en fait le fer de lance des investissements industriels et des créations d’emplois dans les énergies renouvelables. En 2012 la puissance électrique éolienne installée a ainsi dépassé 105 GW dans l’Union Européenne (281 GW dans le monde) avec un taux de croissance dépassant 12%/an et produit 200 TWh (soit un facteur de charge moyen équivalent FCE1 = 21,7% du temps à puissance nominale constante) [1].
Mais avec l’augmentation du taux de pénétration de l’électricité éolienne dans les réseaux électriques nationaux, se pose la question de la gestion d’une énergie certes renouvelable mais aussi intermittente par les opérateurs nationaux de régulation électrique. Les technologies électriques actuelles et les méthodes modernes de gestion des réseaux électriques décentralisés permettent d’ores et déjà d’y faire face et d’accroître la part d’énergies renouvelables fluctuantes et prédictibles comme l’énergie éolienne dans des proportions très importantes, à condition que les investissements dans les structures des réseaux décentralisés intelligents et les sites de stockage/appoint accompagnent cette croissance. Ainsi au Danemark, pays en pointe dans ce domaine comme dans le développement renouvelable [2], la part éolienne de l’énergie électrique dépasse déjà 20% et le gouvernement prévoit de la faire passer à 50% en 2020.
La question se pose alors du bilan énergétique réel de l’industrie éolienne, comme elle se pose d’ailleurs depuis longtemps – mais dans de toutes autres proportions – pour l’industrie nucléaire dans son ensemble [3].
Il est donc nécessaire de dresser l’inventaire :
-
de l’énergie totale investie dans le cycle de vie d’une éolienne, de fermes et de parcs éoliens, et plus largement dans la mise en place des réseaux électriques décentralisés, dans les installations de stockage et de production d’appoint électrique ;
-
de l’énergie réellement économisée sur toute la durée de vie des éoliennes ;
-
du temps de retour énergétique (TRE) éolien ;
-
des impacts écologiques réels (gaz à effet de serre GES, pollutions, atteintes à la biodiversité) du cycle de vie éolien,
et de le comparer aux cycles de vie des autres productions d’électricité, renouvelables (photovoltaïque, hydroélectrique) et nucléaire en particulier.
Cette étude présente une analyse critique de l’économie éolienne à partir des travaux scientifiques internationaux les plus récents, en la replaçant dans le contexte général d’une politique énergétique orientée vers
-
l’utilisation massive des énergies renouvelables ;
-
la gestion rationnelle des flux énergétiques entre les productions et consommations d’énergie primaire et les utilisations d’énergie finale ;
-
l’économie d’énergie et de matières premières ;
-
l’efficacité énergétique
-
le recyclage généralisé des matériaux
-
la relocalisation des productions et des consommations.
Les analyses de cycle de vie éolien (investissement énergétique, consommation de matières premières, impact écologique) font l’objet de cet article dans lequel lnous examinons tout d’abord les différentes méthodes d’analyses de cycle de vie utilisées dans l’évaluation des systèmes de production d’électricité (§ A.1) avant d’en étudier l’application à l’analyse de cycle de vie éolien et les résultats (§ A.2).
A.1. Les méthodes d’analyse de cycle de vie
Afin de comparer rigoureusement les différents modes de production électriques en terme d’investissement énergétique, il est nécessaire d’utiliser des méthodes comparables établissant l’inventaire des consommations d’énergie et de matériaux mobilisées tout au long de la chaîne qui conduit de l’extraction des matériaux de construction des installations à la fabrication des installations, à leur mise en place, à leur maintenance, à leur démantèlement et à leur recyclage.
Ces méthodes font appel à différentes techniques scientifiques d’analyse de cycle de vie (LCA en anglais), utilisées aussi bien pour calculer le coût énergétique du kW éolien que celui du kW nucléaire, même si les chaînes « du berceau au tombeau » ou « du puits à la roue » sont éminemment différentes dans les deux cas.
En toute généralité, elles consistent à inventorier toutes les formes d’énergie « grise »2 de tous les matériaux de fabrication, et toutes les consommations d’énergie primaire lors des étapes de fabrication, de transport des matériels puis des éléments de l’installation, de préparation du terrain, de montage, de connexion au réseau, de fonctionnement, de maintenance, de démantèlement, de recyclage des matériaux et de remise à l’état naturel du lieu d’installation.
Les analyses de cycle de vie évaluent également l’impact de l’installation étudiée en termes de pollutions (gaz à effet de serre, polluants organiques, polluants chimiques, atteintes au milieu environnant et à la biodiversité, etc.).
Depuis leur apparition dans les années 70 en Suisse, en Suède, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis [4], les méthodes d’analyse de cycle de vie ont été normalisées par le SETAC [5] puis par l’ISO [6] (normes 14040, 14044) et par l’UNEP [7] pour permettre une comparaison objective des différentes productions de biens de consommation ou d’énergie. Systématiquement utilisées dans les études universitaires, elles font aussi l’objet de programmes nationaux développés sur internet pour faciliter leur utilisation et leur application (USA [8], Allemagne [9], Europe [10]).
Elles comportent :
-
une phase d’inventaire de cycle de vie (LCI) analysant les procédés de production en termes d’énergie, de matériaux extraits, d’émissions ;
-
une phase d’impact de cycle de vie (LCIA) étudiant les impacts environnementaux ;
-
et une phase d’interprétation ou de gestion du cycle de vie (LCM) produisant une étude critique des modes de production en vue d’en améliorer la gestion.
On peut regrouper ces méthodes en trois grandes catégories :
-
analyses d’entrées-sorties (IOA) : elles divise un produit (électricité par exemple) en composants économiques (machines, produits chimiques, services, etc.) et calcule une performance moyenne pour chacun, utilisée comme entrée pour calculer l’énergie requise et les émissions de GES. Avantage : chaque entrée est facilement évaluée en unités économiques (coûts) et le cycle de vie est décomposé rapidement en séquences d’activités économiques. Inconvénient : c’est une approche statistique de haut en bas peu matérielle et souvent imprécise en termes d’énergie et de matériaux ;
-
analyses de chaînes de procédés (PCA) : le procédé est décomposé de manière précise et réaliste en étapes de fabrication-consommation permettant un bilan matériel, énergétique et écologique précis, aboutissant au cycle de vie complet. Avantage : c’est une approche du bas vers le haut rigoureuse et proche de la réalité matérielle de la production. Inconvénients : c’est une méthode fastidieuse, longue, économiquement indirecte, aux frontières discutables ;
-
analyses de bilans de matière (MBA) : l’objet étudié (éolienne) est décomposé en matériaux dont on peut calculer indépendamment les bilans en termes de coûts énergétiques, environnementaux et économiques. Avantage : c’est une méthode très précise, aux données mondiales bien documentées. Inconvénient : on ne dispose pas de tous les bilans dans les phases amont et aval de la production de l’objet et dans la maintenance du système.
Différents auteurs utilisent de fait des méthodes hybrides, permettant de combiner les avantages de chacune tout en minimisant leurs inconvénients, et d’obtenir des bilans aussi rigoureux que possible, ce qui n’est pas toujours aisé dans l’analyse de systèmes complexes comme les installations de production électrique.
Dans le cas de l’éolien comme de l’ensemble des énergies renouvelables, la plupart des analyses de cycle de vie dressent un bilan énergétique actuel de ces dispositifs sans tenir compte des développements futurs, de leur insertion dans des structures modernisées et décentralisées, des effets d’économie d’échelle engendrés par leur généralisation. Des méthodes dynamiques d’analyse de cycle de vie récentes [11] comblent aujourd’hui ce manque et apportent un éclairage très utile à l’économie des énergies renouvelables qui renforce considérablement le bilan positif de leur généralisation.
2. Temps de retour énergétique et cycle de vie éoliens
L’examen détaillé ci-dessous des travaux scientifiques internationaux les plus récents et les plus importants sur l’énergie éolienne, s’il montre une grande diversité d’approches et de contextes, permet aussi de dégager les grandes constantes qui caractérisent les systèmes de production éoliens : un temps de retour énergétique TRE3 très court (entre 4 et 10 mois), un rapport d’efficacité énergétique EROI4 élevé (entre 10 et 70), un très faible impact écologique.
- L’étude très récente (2011) de l’Ostforld Research de Norvège et de l’Hydro-Québec canadien [12] compare les émissions de GES des analyses de cycle de vie éoliens et hydroélectriques internationales pour en dégager les grandes tendances après normalisation (limite des systèmes identiques, exclusion des réseaux électriques) . Elle montre que la moyenne des émissions de GES des installations éoliennes décroît fortement avec la puissance des éoliennes – passant de 20,5 g CO2éq/kWh pour la tranche 0,1-0,5 MW à 10 g CO2éq/kWh pour la tranche 1-5 MW – et qu’elle diminue tout autant avec le facteur de charge FC équivalent – de 19 g CO2éq/kWh pour un FC compris entre 16 et 25% à 8,3 g CO2éq/kWh pour un FC de 36 à 45% – ; le cas des éoliennes en mer (offshore) est intéressant car l’élévation des émissions de GES induites par l’éloignement des côtes est compensée exactement par l’élévation du facteur de charge équivalent.
- L’étude menée en 2011 par l’Université allemande de Bochum [13] est a priori la plus défavorable car elle porte sur une ferme éolienne offshore lointaine (6 éoliennes 5 MW à trépied, 6 éoliennes 5 MW à fût, implantées à 76 km du réseau côtier) et que le mixage électrique allemand utilisé pour calculer le pouvoir de réchauffement climatique et l’équivalence électrique en énergie primaire comportait 43% de charbon ; 23% de nucléaire ; 16% de renouvelable et 13% de gaz naturel. Elle utilise la méthode d’analyse de bilan de matière MBA, très précise pour les calculs énergétiques, pour déterminer toutes les consommations lors des phases de construction, de mise en place, de connexion, de fonctionnement-maintenance, de démantèlement et de recyclage. Comme pour toutes les études analysées ci-dessous, tous les calculs, hypothèses et bilans sont explicités. De plus, les auteurs présentent les incertitudes et les analyses de sensibilité des paramètres tels que le facteur de charge nominal, la durée de vie, le taux de maintenance et l’effet d’échelle.
Le temps de retour énergétique éolien est calculé en divisant la consommation totale en énergie primaire cumulée pour la production (fabrication-installation) et le démantèlement de la ferme éolienne par l’énergie électrique produite annuellement – convertie également en énergie primaire à des fins de comparaison (coefficient du mixage allemand : 3,007 kWh EP/kWh él) – diminuée de l’énergie primaire annuelle nécessaire à la maintenance éolienne par hélicoptère et bateau. Dans le scénario de base (durée de vie 20 ans, charge nominale équivalente5 CNE de 3900 h/an à puissance nominale, 12 éoliennes), l’intensité énergétique6 calculée est IE = 0,137 kWh EP/kWh ; le temps de retour énergétique est TRE = 8,8 mois, avec un bilan carbone de 32 g CO2éq/kWh éolien assez élevé du fait du mixage électrique allemand pénalisant de 665 g CO2éq/kWh en moyenne. L’analyse de sensibilité conduit à un TRE = 8,1 mois avec une CNE de 4200 h/an ; 6,1 mois pour une durée de vie de 40 ans ; 7,4 mois pour une échelle de 40 éoliennes de 5 MW. Il est à noter que le câble sous-marin 110 kV pèse 12% du contenu énergétique de la phase de fabrication-installation et la fondation en béton 35%, ce qui pénalise évidemment les éoliennes offshore mais se voit compensé par un facteur de charge équivalent FCE de 44,5%, plus élevé en mer que sur terre.
- Dans une étude américaine de 2010 des Universités de Vermont, de Boston et de Cleveland [14], les auteurs analysent 50 études internationales portant sur 119 turbines éoliennes publiées entre 1977 et 2007, utilisant les deux autres grandes méthodes de LCA (analyse de procédé, analyse entrée-sortie) pour calculer les bilans énergétiques primaires réels.
Ils obtiennent un rapport d’efficacité énergétique ou retour énergétique sur investissement EROI de 25,2 en moyenne, toutes puissances confondues (éoliennes de 300 W à 7,2 MW!), avec cependant une grande dispersion pouvant aller de 1 pour une ancienne éolienne de 2 kW d’avant 1981 à 125,8 pour une éolienne canadienne de 500 kW de 2004 ! L’EROI présente de plus une augmentation logarithmique avec la puissance due à l’économie d’échelle et à la loi de puissance physique du vent, proportionnelle au cube de la vitesse du vent. Pour les quelques éoliennes inventoriées de puissance supérieure à 1MW, l’EROI moyen est de 26,1 pour une puissance moyenne de 2,19 MW. Les quelques temps de retour énergétique TRE obtenus vont de 3,1 mois (éolienne de 500 kW) à 6,4 mois (idem) ; pour les éoliennes de grande puissance : 3,8 mois (1,5 MW) à 4,0 mois (5 MW).
En comparaison, d’après les auteurs, l’EROI moyen des centrales à charbon serait de 8 (mais les coûts externalisés de santé et de pollution ne sont pas pris en compte), les panneaux photovoltaïques de 6,5 et les centrales hydrauliques de 12.
- Dans une étude de 2009 de l’Université de La Rioja (Espagne) [15], les chercheurs appliquent la méthode standard internationale (ISO 14040) d’analyse du cycle de vie à une éolienne terrestre Gamesa 2 MW installée dans le nord de l’Espagne, à partir des données réelles de production électrique pour une durée de vie estimée de 20 ans. Les données de démantèlement sont basées sur l’expérience des fabricants, et les impacts écologiques habituels de fabrication pour les calculs de LCA sont pris en compte et très détaillés. Avec une CNE de 2000 h/an (hypothèse basse), l’éolienne produit 31 fois l’énergie de 5782 GJ (1,61 GWh)7 dépensée sur tout son cycle de vie (EROI = 31), ce qui correspond à un TRE brut de 4,8 mois (mais qu’il faudrait là encore rapporter à l’énergie primaire électrique du pays, ce qui conduirait à un TRE de 1,7 mois). Le recyclage des matériaux en fin de vie permet évidemment de diminuer encore l’impact environnemental de la fabrication.
- Une étude française très intéressante de 2009 (Laboratoire Génie des Procédés pour l’Energie, CNAM IFFI) [16] présente l’analyse de cycle de vie (fabrication, transport, installation, maintenance, démontage et recyclage) menée sur une éolienne de 4,5 MW (durée de vie 20 ans, CNE de 2628 h/an). Elle conduit à un coût énergétique primaire total de 70152 GJ (19,5 GWh), ce qui donnerait donc un TRE brut de 1,65 an si l’on compare ce coût à l’énergie électrique brute annuelle produite par l’éolienne. Comme le précisent les auteurs, il faut cependant aussi exprimer cette énergie électrique produite en terme d’énergie primaire qu’il faudrait autrement consommer sur le réseau français avec une efficacité officielle de 0,35 (EdF), ce qui ramène en fait le TRE à 6,9 mois. Les auteurs évaluent également les émissions de gaz à effet de serre à 15,8 g CO2éq/kWh, bilan qui pourrait être nettement réduit en utilisant les transports ferroviaires au lieu de camions et une fabrication locale.
- Le cas d’une éolienne flottante fait l’objet d’une étude en 2009 de chercheurs de l’Université technique de Prague en république tchèque et de l’Université des Sciences et Technologies de Trondheim en Norvège [17]. Les auteurs appliquent l’analyse de cycle de vie standard à une éolienne flottante de Sway-Multibrid de 5 MW dans une ferme éolienne de 40 turbines installée à 50 km des côtes sur une profondeur de 100 à 300 m produisant 4643 h/an à puissance nominale sur 20 ans à travers un transformateur de 170 kV. L’intensité énergétique s’établit à 0,054 MJ d’énergie primaire consommée par MJ d’électricité produite, ce qui représente un TRE brut de 13 mois et un TRE final de 5,2 mois pour 11,5 g CO2éq/kWh.
- Une étude canadienne de 2005 de l’Université de Newfoundland [18] utilise l’analyse du cycle de vie par modèle de chaîne de production (PCA) pour étudier le cas intéressant d’un système autonome d’éoliennes au Canada, reliées à un ensemble d’électrolyseurs et de piles à combustibles à hydrogène. Ils intègrent les inventaires disponibles élaborés par différents auteurs : de 0,0286 à 0,0328 MJ/kWh (0,00794 à 0,00911 kWh primaire/kWh) et 3,71 à 10,0 g CO2éq/kWh pour les éoliennes (Schleisen, Kemmoku, Voorspools) ; 0,1275 MJ/kWh (0,0354 kWh primaire/kWh) et 19,9 g CO2éq/kWh pour les piles à combustibles (Pehnt, Lassaux) ; 4,32 MJ/kWh (1,2 kWh primaire/kWh) et 11,1 g CO2éq/kWh él pour la production et le stockage d’hydrogène à partir du mixage électrique canadien.
En intégrant l’ensemble des données au calcul d’un système autonome éolienne-pile à combustibles de 500 kW, ils obtiennent une IE de 0,372 MJ/kWh (0,103 kWh primaire/kWh) et 40,6 g CO2éq/kWh au maximum, remplaçant avantageusement les unités diesel autonomes couramment utilisées au Canada.
- Dans une étude australienne et danoise connue de l’Université de Sydney et de l’Institut d’Etudes Gouvernementales Locales de Copenhague [19] parue en 2002, les chercheurs passent au crible toutes les analyses de cycle de vie éoliens produites dans le monde pour souligner leur dispersion et le manque de fiabilité de certaines études (méthodologies douteuses, bases de données imprécises). De fait, les IE répertoriées s’étalent de 0,014 à 1 kWh consommée par kWh électrique produit sur la durée de vie, avec des FCE de 7,6% à 50,4% !
Ils éliminent d’emblée les études inconsistantes et appliquent ensuite une méthode de standardisation (analyse entrée-sortie) aux études considérées comme fiables en ramenant toutes les analyses de cycle de vie éolien à un FCE de 25% et une durée de vie de 20 ans pour calculer une IE normalisée et un TRE normalisé (celui-ci tient compte d’un facteur de conversion moyen de 0,35 kWh él/kWh d’énergie primaire).
Ils obtiennent en moyenne une IEN de 0,062 kWh primaire consommé par kWh éolien produit, et un TREN moyen de 5,2 mois.
Ils terminent leur étude par une analyse de sensibilité de ces résultats aux différents paramètres d’entrée tels que le pays de fabrication (intensité carbone du kWh, matériaux, méthodes de fabrication, efficacité énergétique du procédé), le recyclage des matériaux, le type de maintenance, le choix du béton ou de l’acier pour la fabrication de la tour.
- Une célèbre étude danoise [20] du Laboratoire National Risø parue en 2000 dresse un des premiers inventaires précis par bilan de matière pour l’analyse de cycle de vie complète (de l’extraction au recyclage) en énergie et émissions d’une ferme éolienne sur mer et d’une ferme éolienne sur terre. Elle conduit à un TRE de 4,68 mois pour la première et 3,12 mois pour la seconde sur 20 ans de fonctionnement. Leurs émissions de GES sont de 16,5 g CO2éq/kWh et 9,7 g CO2éq/kWh, respectivement.
études LCA (éoliennes, parcs éoliens) | référence |
[13] |
[15] |
[16] |
[17] |
année |
2011 |
2009 |
2009 |
2009 |
|
puissance nominale | (MW) |
5,0 |
2,0 |
4,5 |
5 |
facteur de charge équivalent FCE | (%) |
44,5 |
22,8 |
30 |
53 |
intensité énergétique IE | (kWh EP/kWhélec) |
0,137 |
0,020 |
0,082 |
0,054 |
EROI |
21,9 |
31 |
36,6 |
46,3 |
|
temps de retour énergétique TRE brut | (mois) |
32,9 |
4,8 |
19,8 |
13,0 |
TRE | (mois) |
8,8 |
1,7 |
6,9 |
5,2 |
TRE/durée de vie | (%) |
3,7 |
0,7 |
2,9 |
2,2 |
bilan carbone | (gCO2/kWhélec) |
32,0 |
– |
15,8 |
11,5 |
Tableau récapitulatif (éoliennes individuelles et parcs éoliens)
Pour être complet, il faut mentionner également l’étude récente (2009) d’un chercheur australien de l’université de Melbourne [21] qui procède à une extension des frontières de calcul du cycle de vie éolien par une méthode hybride combinant les méthodes IOA et CPA. Critiquant la dispersion des études antérieures dues aux différentes méthodes utilisées et aux fortes variabilités des caractéristiques des installations éoliennes étudiées, il inclut un certain nombre de coûts supplémentaires d’ordre économique (emprunts et amortissement de capitaux aux différentes étapes de fabrication) dans la fabrication des matériaux, la publicité, les services, les systèmes annexes de fonctionnement et de transport électrique, etc. Il en résulte une forte augmentation de l’énergie grise estimée (84,2 TJ ou 23,4 GWh, au lieu de 18,7 TJ ou 5,2 GWh par éolienne de 3 MW) mais aussi de l’énergie produite (par le biais du facteur de conversion EP/kWh), de sorte que l’IE éolienne reste de l’ordre de 5%, identique à celle obtenue par les études précédentes ! Le TRE est évalué à 12 mois, et la taille de l’éolienne n’apparaît pas influer significativement le retour énergétique sur investissement (EROI = 21 pour 0,85 MW et 23 pour 3 MW).
À titre d’exemple, la répartition des coûts énergétiques d’une éolienne terrestre de 4,5 MW s’établit ainsi : 75,2% dans sa construction ; 22,3% dans les divers transports ; 7,5% dans sa phase opérationnelle ; -5% récupérés dans la phase de démantèlement-recyclage.
L’investissement énergétique dans la fabrication d’une éolienne Gamesa de 2 MW [15] est distribué entre la nacelle (77,1%), la tour (12,7%), le rotor (8,9%) et les fondations (1,4%).
On peut utilement consulter quelques analyses de cycle de vie éolien complètes accessibles sur internet, comme celles qui ont été réalisées par des bureaux d’étude danois pour la fabrication et le recyclage des éoliennes Vestas [22].
3. Conclusions
Toutes les analyses de cycle de vie rigoureuses et indépendantes menées par les plus grands laboratoires universitaires dans le monde montrent que l’énergie éolienne est de loin celle qui offre le plus faible temps de retour énergétique parmi tous les systèmes de production électrique, renouvelables ou non. L’investissement éolien est donc, avec les investissements dans l’économie et l’efficacité énergétiques, l’investissement productif électrique le plus efficace à réaliser en urgence pour le remplacement progressif des centrales nucléaires.
Pr Thierry de Larochelambert
Chaire Supérieure de Physique-Chimie, Docteur en Energétique
Chercheur à l’Institut FEMTO-ST
Références bibliographiques
[1] Baromètre éolien -Eurobserv’er, Le journal de l’éolien 8 (février 1011)
[2] La politique énergétique du Danemark. Vers un scénario 100% renouvelable en 2050, T. de LAROCHELAMBERT (mars 2011)
[3] L’urgence énergétique (IV). Le nucléaire entre dogme et réalité, T. de LAROCHELAMBERT (avril 2007)
[4] Life-cycle assessment for energy analysis and management, H. A. UDO DE HAES, R. HEIJUNDS, Applied Energy 84 (2007) 817-827
[5] Society of Environmental Toxicology and Chemistry (http://www.setac.org/)
[6] International Organization for Standardization (http://www.iso.org/)
[7] United Nations Environment Programme (http://www.unep.org/)
[8] http://www.epa.gov/nrmrl/std/lca/lca.html
[9] http://www.netzwerk-lebenszyklusdaten.de/cms/content/site/lca/Home
[10] http://lct.jrc.ec.europa.eu/
[11] Dynamic life cycle assessment (LCA) of renewable energy technologies, M. PEHNT, Renewable Energy 31 (2006) 55-71
[12] Life cycle greenhouse gas (GHG) emissions from the generation of wind and hydro power, H. L. RAADAL et al., Renewable and Sustainable Energy Reviews 15 (2011) 3417-3422
[13] Life cycle assessment of the offshore wind farm alpha ventus, H-J. WAGNER et al., Energy 36 (2011) 2459-2464
[14] Meta-analysis of net energy return for wind power systems, I. KUBISCZEWSKI, C. J. CLEVELAND, P. K. ENDRES, Renewable Energy 35 (2010) 218-225
[15] Life cycle assessment of a multi-megawatt wind turbine, E. MARTINEZ et al., Renewable Energy 34 (2009) 667-673
[16] Life cycle analysis of 4,5 MW and 250 W wind turbines, B. TREMEAC, F. MEUNIER, Renewable and Sustainable Energy Reviews 13 (2009) 2104-2110
[17] Life cycle assessment of a floating offshore wind turbine, J. WEINZETTEL et al., Renewable Energy 34 (2009) 742-747
[18] Life cycle analysis of wind-fuel cell integrated system, F. I. KHAN et al., Renewable Energy 30 (2005) 157-177
[19] Energy and CO2 life-cycle analyses of wind turbines – Review and applications, M. LENZEN, J. MUNKSGAARD, Renewable Energy 26 (2002) 339-362
[20] Life cycle assessment of a wind farm and related externalities, L. SCHLEISNER, Renewable Energy 20 (2000) 279-288
[21] Life cycle energy and greenhouse emissions analysis of wind turbines and the effect of size on energy yield, R. H. CRAWFORD, Renewable and Sustainable Energy Reviews 13 (2009) 2653-2660
1FCE = fraction de l’année pendant laquelle l’éolienne tournerait à puissance nominale constante pour produire la même énergie qu’elle produit toute l’année en suivant la puissance variable du vent. Ce facteur, adapté aux centrales électriques thermiques fonctionnant généralement à puissance constante, n’a guère de sens pour des systèmes de production électrique renouvelables fluctuantes (éolien, photovoltaïque, houle, marémoteur). Nous reviendrons sur ces aspects techniques éoliens dans la partie B.
3TRE : rapport entre l’investissement énergétique total dans une éolienne ou une centrale éolienne et l’énergie électrique primaire qu’elle produit annuellement en moyenne
4EROI (energy return on investment): rapport entre l’énergie électrique primaire totale produite par l’éolienne ou le parc éolien durant toute sa vie et l’énergie totale consommée sur tout son cycle de vie
6IE = énergie primaire consommée durant le cycle de vie/énergie électrique produite durant le cycle de vie
71 kWh º 3,6 MJ (conversion physique électricité-chaleur 100%)
Télécharger l’article ici: Energie éolienne: une analyse du cycle de vie performante
Merci pour cet article de qualité et très clair, l’avenir est certainement dans l’éolien.
Avez-vous des informations ou des références concernant l’utilisation de l’éolien à un niveau individuelle ?
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Merci beaucoup pour votre commentaire.
En ce qui concerne le petit éolien domestique, il existe de nombreux fabricants à travers le monde et plus particulièrement en France et en Europe. Vous trouverez des informations assez bien fournies sur divers sites associatifs et commerciaux (je ne fais pas de publicité), tant sur les fabricants et les produits que sur les démarches administratives, les réglementations, les coûts d’installation et les prix de vente si le courant envoyé sur le réseau.
L’éolien domestique peut être une solution intéressante dans les régions aux vents réguliers et importants. Les éoliennes à axe vertical (rotors Savonius, Darrieus) me semblent particulièrement intéressantes car elles valorisent aussi les vents faibles en démarrant à des vitesses de vent de l’ordre de 2 à 3 m/s; de ce fait elles ont souvent une meilleure productivité, un meilleur ROI (retour sur investissement) et une meilleure robustesse car l’orientation du vent n’ayant aucune influence.
D’un point de vue général, que ce soit pour le photovoltaïque, le petit éolien ou la cogénération domestiques, j’estime important de favoriser les dispositifs électriques permettant d’utiliser directement l’électricité produite pour les besoins du bâtiment et des habitants et de n’envoyer sur le réseau que le surplus, de manière à soulager le réseau de toutes les petites fluctuations dont l’accumulation peut être difficile à réguler.
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Bonjour,
Pourriez-vous nous dire pour quelle raison l’on voit souvent des éoliennes à l’arrêt, même en présence de vent ?
Pourquoi, dans un champ d’éoliennes, on en voit certaines tourner et d’autres pas ?
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Effectivement, il arrive que certaines éoliennes soient en arrêt au sein d’un champ d’éoliennes en pleine activité de production. Ce sont généralement des éoliennes en maintenance technique, ou en attente de couplage au réseau électrique (lorsqu’il s’agit d’un nouveau parc ou d’un parc en extension).
Pour des impératifs de sécurité, il est prévu également dans la conception-même des éoliennes qu’elles se mettent automatiquement en arrêt par pivotement des pales et freinage lors qu’un composant interne ou le réseau électrique lui-même est momentanément défaillant, ou lorsque le vent est trop fort.
Enfin, selon la puissance des éoliennes, leur technologie et leur conception, la mise en rotation du rotor (et donc des pales) ne démarre qu’au-dessus d’une vitesse minimale de vent (entre 2 et 4 m/s selon les technologies, 15 km/h en général pour les grandes éoliennes).
Il arrive ainsi que, selon leur position géographique dans le parc, certaines éoliennes commencent à tourner car la vitesse de vent locale dépasse ce seuil, alors que d’autres restent à l’arrêt du fait d’une vitesse de vent locale plus faible, ce qui donne l’impression qu’elles ne fonctionnent pas.
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Bonjour,
selon-vous, la notion d’empreinte écologique est-elle applicable sur un parc éolien, et si oui, dans quelle(s) mesure(s)? Qu’en pensez-vous en matière d’hydrolien?
Très cordialement.
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Toute installation industrielle, agricole, commerciale, et plus généralement toute construction humaine a une empreinte écologique. Elle peut être évaluée par différentes méthodes d’analyse de cycle de vie (cf. mon article) dont le périmètre d’étude peut être limité au système lui-même ou étendu à toutes ses connexions fonctionnelles (réseaux d’alimentation, dessertes, transport, installations auxilliaires).
Les éoliennes sont généralement regroupées par parcs pour précisément limiter l’empreinte énergétique et les coûts annexes (lignes de distribution électrique, postes de transformation). De nombreuses études d’analyse comparative de cycle de vie des systèmes de production électrique prennent précisément en compte l’empreinte écologique du parc éolien entier (par ex., réf [13] et [20] dans mon article, mais bien d’autres ont été publiées depuis qui les confirment), de la centrale photoélectrique, de la centrale géothermique ou de la centrale hydroélectrique du côté des énergies renouvelables sans de flux. Du côté des énergies de stock (biomasse, pétrole, gaz, charbon, uranium, thorium), les périmètres d’étude d’impact doivent inclure les impacts d’extraction, de transformation, de transport, de retraitement de déchets, ainsi que les impacts des pollutions générées par les émissions chimiques et biologiques polluantes qui les caractérisent.
Les parcs éoliens onshore et offshore n’ont pas les mêmes impacts écologiques locaux; ils sont très faibles pour les premiers (essentiellement voirie d’accès si les lignes sont enterrées, ce qui est obligatoire au Danemark); l’impact sur les oiseaux, largement documenté par les études danoises, allemandes et canadiennes, est totalement négligeable, tandis que l’impact sur les mammifères est très faible si l’aménagement des accès est conçu de manière soutenable. Le seul impact écologique local peut être celui sur certaines chauve-souris, mais il doit être d’autant plus relativisé que les grandes éoliennes modernes (2 MW et plus) tournent beaucoup plus lentement.
L’empreinte écologique des parcs éoliens offshore est beaucoup plus réduit que ce que les critiques traditionnelles affirment: la longue expérience danoise montre que les éoliennes offshore implantées sur les fonds marins sont au contraire de véritables niches de biodiversité marine et des nurseries de nombreux coquillages, algues, poissons, et favorisent l’augmentation des réserves halieutiques; les pêcheurs danois sont de ce fait très favorables à leur implantation et les associations écologiques les soutiennent. En revanche, les parcs éoliens offshore peuvent être moins rentables que leurs homologues terrestres s’ils sont trop éloignés des côtes et installés sur des fonds marins trop bas, nécessitant des câblages très longs et des supports métalliques et bétonnés très hauts; les éoliennes flottantes pourraient être une solution plus économique; leur analyse de cycle de vie est encore à l’étude et dépend des installations industrielles en cours d’expérimentation.
Enfin, il est indispensable de préciser la structure énergétique (réseaux traditionnels centralisés, réseaux intelligents décentralisés) dans lequel l’installation énergétique étudiée est insérée. Ainsi, il est possible mais intellectuellement malhonnête d’inclure dans le cycle de vie éolien ou photovoltaïque (énergies variables mais prédictibles) des installations auxiliaires de production électrique d’appoint à gaz ou à fuel, alors que les productions électriques variables (ou fluctuantes) peuvent très bien être gérées de manière efficace et rationnelle dans les réseaux intelligents généralisés dans lesquels les réseaux intelligents d’électricité, de gaz et de chaleur (voire de froid) sont complètement intégrés et assurent à eux-mêmes à la fois la distribution, le stockage et la transformation avec des efficacités bien plus grandes que dans les réseaux traditionnels.
Les parcs hydroliens en cours d’installation vont aussi être l’objet d’analyses de cycle de vie, mais ils semblent d’ores et déjà très favorables pour les hydroliennes conçues pour permettre la circulation des poissons sans les endommager (il en est de même pour les nouvelles turbines hydrauliques au fil de l’eau sur les fleuves et les rivières). Le gisement énergétique français, européen et mondial et la permanence des courants marins font de cette ressource renouvelable un atout très important pour de nombreux pays.
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Merci beaucoup pour cette réponse très argumentée.
Très cordialement.
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Le nucléaire est maintenant une énergie du passé malgré les centrales de nouvelle génération. L’avenir énergétique appartient au photovoltaïque et à l’éolien. Seul le renouvelable est envisageable lorsque l’on voit la croissance rapide de notre consommation énergétique sur http://www.fournisseur-energie.com/. L’arrivée quotidienne de nouvelles technologies de plus en plus indispensables et de plus en plus accessibles financièrement ne laisse présager qu’une forte croissance de la demande énergétique.
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La hausse des consommations d’énergie dans les décennies à venir est peu probable dans les pays dont le niveau de vie est déjà élevé, et serait le symptôme d’une efficacité énergétique dégradée. C’est au contraire une forte décroissance des consommations énergétiques à laquelle nous devrions assister dans nos pays et qu’il nous faudra préparer et soutenir pour contrer le changement climatique, accroître nos efficacités énergétiques, valoriser nos ressources naturelles renouvelables nationales et locales, et créer les millions d’emplois qui marqueront une réelle transition énergétique digne de ce nom.
Ce sont précisément les pays les plus avancés dans cette transition (Danemark, Suède) qui voient diminuer leurs consommations d’énergie nationales et leurs émissions de gaz à effet de serre, précisément parce qu’ils ont anticipé la mutation de leurs systèmes énergétiques depuis des décennies pour injecter massivement les énergies renouvelables, généraliser la cogénération, installer les réseaux intelligents couplés d’électricité, de chaleur et de gaz (voire de froid), recycler les matériaux dans une perspective d’économie circulaire.
Même la consommation électrique baissera car le chauffage électrique, qui est un non-sens physique et qui a été encouragé en France de manière irresponsable, sera progressivement éliminé et remplacé par des systèmes de chauffage plus efficaces (solaire, pompe à chaleur, cogénération bois, biogaz), que ce soit en chauffage individuel ou en réseau de chaleur; l’éclairage est bien plus efficace depuis l’émergence des led (et son efficacité continue de croître); les moteurs, pompes, ventilateurs, réfrigérateurs, congélateurs ont vu leur efficacité considérablement augmenter; les systèmes de régulation et de contrôle des chauffages, des éclairages, des process industriels sont de plus en plus performants; les technologies utilisées pour les écrans sont bien plus sobres aujourd’hui, et les perspectives d’amélioration ultérieures sont réelles.
Il est aussi probable que l’injection massive des énergies renouvelables dans les systèmes énergétiques européens conduira à une gestion plus rigoureuse et rationnelle des usages de l’énergie.
Le remplacement progressif des véhicules thermiques par des véhicules hybrides ou électriques non seulement permettra d’économiser l’énergie (avec les nouvelles batteries spécifiquement adaptées au stockage longue durée, plus efficaces et moins coûteuses en énergie grise) mais aussi de gérer les variations des productions éoliennes et solaires, tout comme la MDE (maîtrise de la demande d’énergie), en particulier le déplacement des consommations pilotables dans les réseaux intelligents (Smart Grids).
Les prospectives pour 2030 et 2050 dans les pays européens sont basées précisément sur la baisse des consommations et des importations d’énergie.
Si de plus les pays en cours de développement adoptent dès le début une politique vertueuse d’efficacité énergétique pour assurer leur développement (et nous pouvons les accompagner dans cette démarche), consolider leurs systèmes d’éducation et de recherche, leur autonomie énergétique et alimentaire, préserver leurs ressources biologiques et leur biodiversité en recourant dès maintenant aux énergies renouvelables, cela rend possible l’évitement de la catastrophe climatique prévisible et de plus en plus menaçante.
L’augmentation sans fin des consommations d’énergie n’est pas inéluctable, pas plus qu’elle n’est inscrite dans la nature.
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L’énergie éolienne est certes une énergie renouvelable à développer mais la mise en place de ces éoliennes est très « spacieuxphage » :
une éolienne produit en moyenne 2MW alors qu’un réacteur nucléaire produit en moyenne 1GW donc il faudrait 500 éoliennes pour produire autant qu’un réacteur.
Exemple concret chooz B dispose de 2 réacteurs de 1.5GW sur une surface de 1340km2, je me demande quelle surface faudrait-il pour installer les 1500 éoliennes afin de remplacer ces 2 réacteurs??
Sachant que 50 éoliennes sont placées sur 3000km2 en moyenne donc le calcul donne pour nos 1500 éoliennes une surface de 90000km2 soit 14% de la surface de la France!!
On ne peut occulter ce souci majeur à mon sens. Il est clair qu’il faille davantage se tourner vers les énergies propres… Mais ne doit-on pas garder un minimum de surface pour tout simplement nous nourrir? (inutile de vous dire que l’argument de dire que les éoliennes sont édifiées en plein champ agricole ne suffit pas). Voyons ce qu’il advient en Chine, l’état investit les terres africaines…
Je précise : je suis loin d’être un « fan » du nucléaire.
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Vous l’avez compris erreur de conversion 50 éoliennes pour 3km2 environ soit pour 1500 éoliennes 90km2. Pour couvrir 14% de la surface de la France il faudra 1 500 000 éoliennes qui fourniront une énergie en moyenne de 3TWh, le nucléaire fournit environ 416 TWh en France.
Conclusion : plus d’un million d’éoliennes pour couvrir 1% de la production nucléaire en France.
Toujours la même problématique :
« SPACIEUXPHAGE »
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bonjour
je ne sais pas d’où vous tirez vos chiffres (références?) mais ils semblent aberrants. Nous (chercheurs, énergéticiens, prospectivistes) utilisons les données issues de décennies d’expérience d’installation d’éoliennes et nous intégrons les nouvelles technologies éoliennes, comme nous le faisons aussi pour le photovoltaïque, l’hydraulique, les filières biomasse, la géothermie, les énergies marines, etc.
Les surfaces mobilisables pour chaque type de production doivent être calculées à partir des ratios Cu = Pn/Su où Pn est la puissance nominale installée, et Su la surface utilisée par l’installation.
Pour l’éolien terrestre classique (éoliennes de 2 à 3 MW), Cu = 8 W/m²; pour l’éolien terrestre de nouvelle génération de puissances similaires, Cu = 5,3 W/m²; pour l’éolien maritime, Cu = 10 W/m².
Pour calculer l’énergie éolienne produite par an, il faut ensuite multiplier Cu par la surface totale utilisée Su, par la fraction horaire de production équivalente à puissance nominale Fc et par la durée annuelle 8760 h/an.
Différentes évaluations des surfaces disponibles pour chaque filière ont été menées en France, et je prendrai simplement la plus officielle qui est celle de l’ADEME tout récemment publiée, qui a évaluée des gisements en tenant compte des taux de surface réellement disponibles (il ne s’agit pas du potentiel maximal éolien, déjà évalué dans les publications scientifiques et que je peux vous donner également, mais du potentiel équipable normalement, compte tenu des contraintes environnementales et législatives). Les chiffres ci-dessous ne concernent que la métropole.
La surface utilisable pour l’éolien terrestre classique est de 21759 km² (3,9% du territoire); avec une fraction horaire nominale équivalente moyenne française de 24% (il a été évalué pour chaque région), cela conduit à une puissance nominale installée de 174 GW, produisant 365 TWh/an.
Avec les turbines éolienne de nouvelle génération, Su = 22710 km² (4,1% du territoire), de fraction horaine nominale équivalente moyenne française de 32%, la puissance nominale installée serait de 120 GW, produisant 337 TWh/an.
L’éolien en mer non flottant peut être raisonnablement installé sur 2009 km² avec une fraction horaire nominale équivalente de 47%, ce qui représente 21 GW, produisant 82 TWh/an.
L’éolien en mer flottant peut être installé sur 4614 km² avec une fraction horaire nominale équivalente de 49%, ce qui représente une puissance nominale installée de 46 GW, produisant 195 TWh/an.
Ces énergies, convenablement distribuées, converties et stokées, couvriront très largement une grande partie de notre consommation électrique et contribueront à la production conjointe de chaleur et de gaz (hydrogène) dans les réseaux intelligents couplés que la France doit commencer d’installer dès maintenant pour préparer la révolution renouvelable.
L’ADEME prévoit dans son étude prospective pour 2030 et 2050 plusieurs scénarios que je vous invite à lire entièrement et attentivement sur son site internet. Le scénario standard est de 34 GW d’éolien terrestre (65 TWh/an) et 12 GW d’éolien maritime (37 TWh) installés en 2030.
En 2050, les projections de l’ADEME conduisent à 40 GW installé en éoliennes terrestres et 30 GW d’éolienes maritime posées et flottantes.
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Je tiens à signaler que les messages précédents sous mon nom était une « analyse » d’un adolescent de 1ere S et je suis d’accord avec ce qui a suivi : les chiffres étaient aberrants! Mais il a eu le mérite de chercher… On apprend souvent de ses erreurs!
Je remercie Monsieur le Professeur De Larochelambert pour toutes les précisions apportées qui ont permis de l’éclairer!
Moi je suis une personne dans le domaine de l’électricité et je veux juste reprendre l’exemple concret de la centrale de Chooz afin de faire une comparaison avec le potentiel éolien installé en France :
La centrale de Chooz B produit 21,5 TWh/an (source EDF dossier de presse février 2014).
Cette unique centrale (2 réacteurs) couvre bien la production totale en énergie éolienne en France qui s’élève à 21 TWh/an (source RTE bilan électrique 2015 et l’ADEME reprend ce chiffre dans les avis de l’ADEME février 2016).
Je pense que cet adolescent a eu le mérite de poser la question de l’espace occupée…
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Pour compléter la réflexion sur les systèmes de production électrique, il faut souligner que les modes de production nucléaire et renouvelables ne peuvent pas être simplement comparés en termes de puissance et d’énergie sans considérer leurs spécificité, leurs analyses de cycle de vie, leurs places dans les réseaux de distribution, etc.
Par exemple, dans le calcul des emprises au sol, on oublie souvent que l’énergie nucléaire consomme des combustibles (pastilles d’oxyde d’uranium enrichi à 3 ou 4%, voire pastilles de mélange d’oxydes d’uranium et de plutonium) qui requiert la construction d’usines d’extraction, de fabrication de yellow cake, de fluoration, d’enrichissement, de fabrication de pastilles, de fabrication de gaines d’alliage de zirconium (donc d’usines d’extraction de ce métal), puis des bâtiments de refroidissement et de stockage sur des décennies des barres de combustibles irradiés, et pour la France qui pratique de retraitement des combustibles, des usines de retraitement des combustibles où l’on découpe les barres de combustibles irradiés, on les dissout dans l’acide nitrique, on sépare chimiquement les différents actinides (dont l’uranium et le plutonium) des produits de fission qui constituent alors des déchets ultimes qu’il faut aussi traiter dans des usines dédiées pour les enrober dans des verres ou des fûts de béton selon leur dangerosité, qu’il faut ensuite stocker aussi avec d’autres déchets nucléaires produits par toute la chaîne de fabrication de faible, moyenne et haute activité, de durées de vie radioactive pouvant aller de quelques années à plusieurs millions (voire milliards pour certains éléments radioactifs) d’années dans des installations de stockage provisoires puis de très longue durée (voir le projet Cigéo pharamineux, très coûteux et risqué de plusieurs centaines de km de galeries de béton enterrées à 600 m de profondeur). Toutes ces installations requièrent de très grandes surfaces qui doivent être intégrées dans l’emprise au sol, de même que l’énergie grise qu’elles représentent dans l’analyse de cycle de vie complète du kWh nucléaire.
L’énergie éolienne, l’énergie solaire, l’énergie hydraulique, l’énergie géothermique ne requièrent aucune fabrication de combustible: le vent, le soleil, l’eau qui s’écoule sont naturels et gratuits.
D’autre part, si l’énergie éolienne et solaire sont variables dans le temps, avec cependant une très bonne prévisibilité, ce sont des énergies décentralisées et réparties par essence, et naturelles (le soleil envoie chaque heure plus d’énergie que l’humanité n’en consomme en 1 an!).
L’énergie nucléaire est centralisée, peu modulable (les modulations de régime sont limitées à 3%/min environ mais elles entraînent des vieillissements accélérés des pastilles, des gaines, des aciers de cuve et de conduits primaires, des déformations, des fissurations et donc des productions de pollution radioactive supplémentaires) et les risques qu’elle représente (accidents majeurs, contaminations radioactives) sont d’une ampleur telle que les coûts humains et écologiques sont incommensurables, financièrement exorbitants (cf. Fukushima) et non assurés par les grandes compagnies d’assurance. Rien de tel avec les renouvelables.
Enfin, il faut distinguer les énergies renouvelables de flux (éolien, solaire, hydraulique au fil de l’eau, houle, courants marins) et de stock (biomasse, géothermie, hydraulique de barrage et de station de pompage, énergie thermique des mers), et parmi les énergies de flux, il faut aussi distinguer les énergies soumises aux variations météorologiques (éolienne, solaire, houle) qui sont maintenant bien prévisibles et peuvent être foisonnées sur de grandes distances pour lisser les variations) des énergies continues ou variables aux échelles saisonnières (hydraulique au fil de l’eau, courants marins).
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